Elle est assise au jardin. Pas le coin le plus confortable ni le plus éclairé. Le plus existant. Le présent y épouse l'arbre, la pierre, le repos. Le chat le sait qui dort tranquillement sur ses genoux. Une même importance rassemble l'eau, l'air, le feu, la terre, ces choses que les usages ne voient plus. Elle respire sans éloquence, sans justifications. Hors tout, dans tout. Elle bruisse avec le vent, rince avec la pluie, chante aux gorges des oiseaux. Place jumelle de toutes les places, de mûres et de ronces dans la lumière, elle est le simple du jour qui écoute les grenailles de ruisseau sécher les derniers éclats de larmes. Une aptitude de montagne haute, de grelots rieurs dans les feuilles, de paletots transparents sur les heures, l'accompagne. Quelque chose caresse les herbes, nourrit les racines, éclabousse les talus, réconforte les images. Même l'odeur surette de la jacinthe fanée garde un parfum subtil. Et la douleur, ô la douleur, qui élève ses implorantes mains d'argile, même elle, se dissoud.
Ile Eniger - Les pluriels du silence (à paraître)