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5 avril 2024 5 05 /04 /avril /2024 22:21

Le silence même est habitable.

 

Là, sur une place d'herbes folles, où des ruines s'inventent désespérément un futur, absent de tout, je n'attends rien que la brève embuscade qu'ombre et lumière tendent depuis l'aube à mon corps au verbe d'air.

 

Ainsi ai-je écrit : en marge de tout ce qui est figé mais

mais la révolte, mais la glaise rouge des ravines, mais l'eau qui fait défaut, mais la solitude, mais l'amour, mais le ciel s'usant à longueur d'heures, mais le soleil ramenant ses voiles au port le plus proche, mais la mort, mais la fatigue prise au piège du labeur, mais...

 

Jean-Claude Izzo - "Loin de tous rivages" - Éditions du Ricochet

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21 mars 2024 4 21 /03 /mars /2024 15:13

À l'aube du buisson

on peut voir se lever

la flamme d'un oiseau

 

la lumière se poser

dans la main des feuilles

 

la pluie enchanter

ses abeilles limpides

 

le silence à genoux

et les heures offertes

comme des fruits sucrés

 

on peut voir bien des choses

à l'aube du buisson

 

Jean-Pierre Siméon

Extrait de "À l'aube du buisson" - Cheyne éditeur

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3 mars 2024 7 03 /03 /mars /2024 12:11

 

on voit resurgir partout les tempêtes

l’actualité est une lame de couteau

qui empale chaque oiseau dans son chant

tout est abus et drame

et bête lente qui s’attache à nos pas

à nos yeux

sauf la fleur en sa perfection artisanale

tout est déçu

sauf la rive insensée de ta douceur

et la précision diligente et muette de ta main

sur le moyeu blanc de mon âme

je te prononce à peine

parce que l’enfant qui te remue n’est pas pour eux

ils le casseraient entre leurs doigts

on va se toucher d’un autre soleil

se nourrir du sel des premières étoiles

et recourir à des mots si minimes

qu’ils semblent ne jamais avoir été prononcés

Barbara Auzou

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22 février 2024 4 22 /02 /février /2024 15:29

L'intelligence artificielle et autres inepties remarquablement dénoncées par l'astrophysicien Aurélien Barrau. Un moment jubilatoire et respiratoire !

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29 janvier 2024 1 29 /01 /janvier /2024 12:16

doucement

comme une fleur de silence

sans corde de rappel

dans le sonore des vallées et contre l’éventualité de l’ombre

je me fabrique la peau des lendemains

 

Barbara Auzou (sur : Lire dit-elle)

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28 janvier 2024 7 28 /01 /janvier /2024 16:22

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15 janvier 2024 1 15 /01 /janvier /2024 10:50

J’ai hâte que les oiseaux reviennent recoudre les nuages, les outardes, les oies blanches, les bernaches. Je reste seul en compagnie des chaises. J’écris avec la soupe à l’alphabet, un potage d’images où l’os prédomine. Quelques virgules suffisent pour relever la sauce parmi les bouts de viande et les morceaux de phrases. De la lumière s’ajoute aux feuilles, du miel aux abeilles et du ciel aux rivières. J’ai jeté mes cigarettes. Je ne fais plus de signaux de fumée en grillant des clopes, je me contente du mégot des mots, de la braise des phrases. J’allume la parole avec un stylo Bic, son encre à pointe fine, son alphabet mouillé, ses adverbes rouillés.

 

J’ai hâte de retrouver mon loup, les chevreuils et leur chapelet de crottes, la course des lièvres, les écureuils courant à l’envers des branches, croquant des noix sur la pelouse, le poil roux des tamias, mes gestes et ma cabane dans le bois, l’intelligence des érables, la tendresse des bêtes, l’alphabet des plantes, la sagesse des pierres, la fraîcheur des ruisseaux. Je suis en beau calvaire devant la condition du monde, la cruauté des guerres, le sang versé des hommes, la pauvreté du cœur.

 

Les bras du monde rembobinent leurs veines, la colline ses torrents, la forêt ses sentiers. Mes souliers débobinent leurs pas. Je mets la table où ma blonde n’est pas. Elle n’est pas loin, presqu’à portée de main. Elle bouge dans la pièce d’à côté où je n’ai pas accès. Son regard me scrute. Elle respire dans le souffle du vent. C’est pour elle que j’écris et mes petits-enfants.

 

Je rêve d’un arbre pour les oiseaux, de céréales pour le pain, de vignes pour le vin, de contes pour les enfants qui se fabriquent des jouets avec des bouts de rien, des boutons de chemise, des trombones, des clous rouillés, des planches vermoulues. J’attends que remonte la ligne d’horizon, que le soleil y boive entre les écrevisses et les paumes terreuses.

 

Les yeux ouverts de l’homme peuvent aussi voir la nuit. Ouvrant les ailes de mes mains, je quête des caresses. J’enquête sur les choses. Je butine les roses comme une abeille d’encre sur un champ de papier. Je suis un géographe des brindilles, un ramasseur de rien. Le rêve et le réel s’unissent pour broder l’infini.

 

Jean-Marc La Frenière (Québec - 1948/2023) - Extrait de "Le bord de la nuit" (inédit) © (texte et photo) Éditions Chemins de Plume.

 

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14 décembre 2023 4 14 /12 /décembre /2023 18:06

Une belle écriture !

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14 décembre 2023 4 14 /12 /décembre /2023 15:14

Quelques haïkus de Colette Muyard ©

 

S’entrouvre le jour

Fragiles sur leurs syllabes

les mots se relèvent.

**

Fugace mirage

Une flamme d’écureuil

traverse l’aurore.

**

Laine des  nuages

Le temps s’est emmitouflé

Cocon d’un automne.

**

Caresses de sève

L’arbre me prend dans ses branches

Nous touchons le ciel.

 

Colette Muyard ©

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12 décembre 2023 2 12 /12 /décembre /2023 16:47

J'attache de la valeur à toute forme de vie, à la neige, à la fraise, la mouche. J'attache de la valeur au règne animal et à la république des étoiles. J'attache de la valeur au vin tant que dure le repas, au sourire involontaire, à la fatigue de celui qui ne s'est pas épargné, à deux vieux qui s'aiment. J'attache de la valeur à ce qui demain ne vaudra plus rien et à ce qui aujourd'hui vaut encore peu de chose.
 

Erri de Luca - Extrait de Œuvre sur l'eau

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28 novembre 2023 2 28 /11 /novembre /2023 18:12

 

Le vase brisé

 

Le vase où meurt cette verveine
D'un coup d'éventail fut fêlé ;
Le coup dut l'effleurer à peine,
Aucun bruit ne l'a révélé.

 

Mais la légère meurtrissure,
Mordant le cristal chaque jour,
D'une marche invisible et sûre
En a fait lentement le tour.

 

Son eau fraîche a fui goutte à goutte,
Le suc des fleurs s'est épuisé ;
Personne encore ne s'en doute,
N'y touchez pas, il est brisé.

 

Souvent aussi la main qu'on aime
Effleurant le coeur, le meurtrit ;
Puis le coeur se fend de lui-même,
La fleur de son amour périt ;

 

Toujours intact aux yeux du monde,
Il sent croître et pleurer tout bas
Sa blessure fine et profonde :
Il est brisé, n'y touchez pas.

 

Sully Prudhomme

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