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11 novembre 2024 1 11 /11 /novembre /2024 12:00

C'était un homme ordinaire, un qui tous les jours partait à vélo jusqu'à son carré de jardin pas loin du village. Ses outils bien rangés dans le cabanon de bois, au soir il ramenait des légumes et des fleurs. Il parlait patois avec ses vieux amis. Tous les 11 novembre, il se rasait de près, prenait soin de sa mise et partait au cimetière pour le dépôt de gerbe de la commune à ses enfants "Morts pour la France durant la Grande Guerre" comme il était écrit au fronton du monument aux morts. Une fois, je l'avais accompagné, il tenait ma main. Quand le clairon de la sonnerie aux morts a retenti, il l'a lâchée, s'est essuyé les yeux avec son mouchoir à carreaux qui sentait la lavande, puis il l'a reprise, bien serrée. J'étais petite, sept ou huit ans. J'avais entendu dire qu'à la guerre, il avait porté sur son dos, pendant des kilomètres de tranchées aux boyaux boueux, pestilentiels, glaciaux, sans eau, un camarade blessé, et que pour cela, on lui avait donné une médaille qu'il laissait dans sa boîte au fond d'un tiroir parce que, disait-il : "Je ne l’ai pas fait pour une médaille, mais parce que c'était normal". C'était un homme ordinaire Gustave, c'était mon grand-père.

 

Ile Eniger - Les mains frêles - Éditions Chemins de Plume

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9 novembre 2024 6 09 /11 /novembre /2024 13:57

Un échange qui éclaire sur les dangers de l'IA et notre propre choix d'existence en fonction des situations. Deux intervenants brillants.

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24 octobre 2024 4 24 /10 /octobre /2024 13:35

... En attendant, tout ayant disparu, il reste encore la poésie. Cela vous fera peut-être sourire. Non pas l'acte d'écrire, mais la vie en poésie. La poésie est la dernière religion pour celui qui n'en a plus. Le poème est la dernière morale. Je m'explique. La feuille de papier blanc qui est devant vous est un miroir. Vous allez vous pencher sur elle et quoique vous écriviez, qu'importe le sujet, vous allez décrire votre visage, votre vrai visage. (Dans le choix même du sujet : choisir c'est se définir). Personne ne vous a demandé cela. Personne ne le lira même peut-être. Mais ce que vous allez écrire est sans complaisance. Il s'agit d'être acculé à son âme. Ce que vous allez dire et faire engage votre vie, votre manière de vivre, votre morale. Votre poème est devenu un serment de fer. Vous ne pouvez plus vous tromper vous même, vous leurrer, tromper les autres sous peine de forfaiture. Ainsi sur ce chemin austère on avance. C'est cela vivre aussi peut-être. L'écriture est un bûcher. Élaguez tout ce qui est faux, artificiel, joli, trop joli. Gardez l'essentiel et avancez.

 

Jean Malrieu (Avec ma main amie)

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22 octobre 2024 2 22 /10 /octobre /2024 21:45
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20 octobre 2024 7 20 /10 /octobre /2024 11:18
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11 octobre 2024 5 11 /10 /octobre /2024 17:03

J'ai essayé pourtant. Les soirées littéraires rassurantes à peu de frais. Les rassemblements engagés hauts les cœurs où l'on se croit plus fort. Les réseaux dits sociaux, miroirs qui mentent aux alouettes. Les discussions personnalisées confortables d'égotisme. Les blogs confidentiels, les vitamines à la mode, les médecins indifférents, les prières patentées, les lectures reconnues, les rivages inconnus, les respirations conscientes, les lâcher-prises conseillés. J'ai essayé. J'ai essayé l'acceptation et le refus d'un monde inconséquent. J'ai essayé vraiment. La marche, le vélo, de loin, de près, avec, autour, partout, vers, jusqu'à perdre ma voix, ma voie, et au désert mes traces. J'ai essayé beaucoup. L'amitié, le pardon, l'éloquence, la confiance, le cri, le silence. Alors aujourd'hui assez ! Je quitte les apnées, les questions, les intégrations, les réponses sous vide et tout le reste qui n'en sait pas plus que moi et qui fait semblant. Je regarde. Les lunes bleues ou rousses des hasards du ciel, les mésanges imprudentes dans les oliviers, le chat et son travail de chat, la pluie sur tous les toits des hommes, des bêtes, des arbres. Je jette tous les moules. Je suis de l'air et l'âge qui me traversent. Du rien, du tout, qui me dépassent. De la douleur et de la joie qui me rencontrent. De la place unique qui existe sans raison. Au diable ce qui manie l'encensoir, la certitude, le jugement. Ce qui agite chiffons de peurs, d'illusions, de laideurs. Ce qui impose et croit savoir. Je respire sans justifications. Respire ma fille, tu es Libre.

 

© Ile Eniger - L'ordinaire des anges (à paraître)

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11 octobre 2024 5 11 /10 /octobre /2024 17:03

Avec le départ de l’exceptionnel, de l'essentiel partage, un pays m’a été ravi. Me reste l’exil et sa caricature d'existence. Je donne le change mais plus grand-chose ne vibre. Je participe pauvrement. Je ne confie plus à quiconque la clé de mon territoire. Je parle, je fais, à la surface de la surface. Je ne vis pas, je cohabite. Tu as emporté tes couleurs, et les miennes, et le sens du jour qui se lève. L’entour s'agite sans toucher la peau de ma joie déracinée.  Reste un souffle étroit, un gris tendre inutile et un lointain semblant d’écriture qui s'obstine. Ni déprimée, ni désespérée, mais bien au-delà, je suis une maison cambriolée.

 

© Ile Eniger - L'ordinaire des anges (à paraître)

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28 septembre 2024 6 28 /09 /septembre /2024 12:58
J'aurai le plaisir de vous rencontrer sur le stand des Éditions Chemins de Plume, au BT A Littérature, lors du Festival du Livre de Mouans-Sartoux les vendredi 4, samedi 5 et dimanche 6 octobre 2024.

J'aurai le plaisir de vous rencontrer sur le stand des Éditions Chemins de Plume, au BT A Littérature, lors du Festival du Livre de Mouans-Sartoux les vendredi 4, samedi 5 et dimanche 6 octobre 2024.

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25 septembre 2024 3 25 /09 /septembre /2024 12:56
Depuis que tu es parti où je ne sais pas que tu es, je continue à te partager notre vie. Ce nous qui arbitrait tous nos gestes pour inventer un vivre ensemble qui nous était essentiel. Aucun mouvement d'agitation ne me capture, ne me captive, ne me déroute. Tu es plus que là, tu es partout. Et qu'il pleuve ou qu'il vente, cette immensité lumineuse me redonne la force du noyau. Pourtant, même le chat s'est envolé, comme toi un jour de juillet, laissant les mêmes larmes et la trace de ses pattes douces sur le bord de mon âme comme tu y as laissé l'empreinte du bonheur. Je fuis ceux qui me voudraient "passer à autre chose", comme si l'amour était un produit remplaçable. Comme si le but était de tout combler, le vide, la douleur, le quotidien. Comme si tout devait passer alors que c'est nous qui passons, alors que chacun de mes pas solitaires porte l'accompagnement du rien éblouissant de ta présence absente. Et à chaque bout de soir, dans le soleil qui s'éteint, je me rappelle que rien ne meurt, que tu es ma maison, que je ne vivrai pas ailleurs.
 
© Ile Eniger - L'ordinaire des anges (à paraître)

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20 septembre 2024 5 20 /09 /septembre /2024 12:49

Contrairement à une croyance qui rendrait la poésie dépendante de nos regards pour exister, je crois qu’elle n’a besoin de personne pour être.

Sa permanence, en amont et aval de toute chose, dépasse ce que l’on peut en penser ou en dire. Préexistante à la pensée et à l’acte, la poésie est un état, une source illimitée dans laquelle chacun peut puiser.

Écrire "joli" me semble un leurre pour s’attirer la faveur du lecteur, et se servir de ce trompe-l’œil pour plaire est une trahison de soi et de l’art poétique. Aucune manigance ne devrait entacher la création.
La poésie m’est source, non moyen, elle est, et je n’en suis que le rapporteur à travers un regard.
Il y a autant de facettes que d’auteurs, et plusieurs facettes par auteur, dans cette multitude, l’ouvrage poétique devrait consister à mêler absolu et matière sans subterfuge ni artefacts.

Écrire m’est un parcours solitaire engageant humilité, personnalité et travail.

La poésie est native, le poète n’en est que l’outil qui donne à voir. Funambule, je choisis ma hauteur, ma traversée, mon risque. C’est ainsi qu’à partir de l’omniprésence du concept poétique, mes textes animent un kaléidoscope infini appréhendé par mon individualité pour rendre compte de quelque chose qui lui préexiste. Quand je regarde une fleur d’amandier sous la neige, je sais que la poésie existe sans mots, mon regard et mon émotion en captent l’absolu bien avant ma réflexion et ma mise en texte.
René Char disait : "L’impossible nous ne l’atteignons pas, il nous sert de lanterne", si je remplace "impossible" par "poésie" (La poésie nous ne l’atteignons pas, elle nous sert de lanterne), la phrase illustre le sens de mon parcours poétique.
Ma démarche engage donc émotion, travail et rigueur, pour une œuvre que je souhaite au service de la poésie et non le contraire.
Je crois qu’un texte est fini quand il atteint le maximum de ce que je suis capable de lui demander et de lui donner. Ce n’est pas la perfection, puisqu’elle n’existe pas, mais c’est ma perfection du moment, le point culminant possible du texte et de son auteur. "La perfection n’existe pas, seul le chemin vers elle, existe", ai-je écrit dans un de mes recueils.
Et puis, le trait de génie n’étant jamais qu’accident et fulgurance (c’est d’ailleurs pour cela qu’on l’appelle "trait"), la globalité du parcours d’écriture me paraît ne pouvoir faire l’économie du mélange inspiration/travail duquel va naître la "patte d’écriture" qui elle, se doit de chercher sans cesse le meilleur d’elle-même.

Je crois que l’écriture, comme tout art, devrait échapper, en première instance, aux jeux et enjeux des constructions mentales et intellectuelles. La poésie n’a besoin d’aucun embellissement car la lumière n’a pas besoin d’être illuminée ; mais on peut la révéler au moyen d’une identité. L’écriture est un vortex.
J’aime à penser que créer est une respiration à portée visionnaire se nourrissant d’une source infinie et élargissant l’incarnation de son auteur et celle de son lecteur.
Colette disait : "Il faut avec les mots de tout le monde, écrire comme personne".

Dans le collectif où il évolue, le poète est unique, c’est cette unicité qui doit ouvrir fenêtres sur.
Ile Eniger

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11 septembre 2024 3 11 /09 /septembre /2024 11:50

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"N'allez pas là où le chemin peut mener,

allez là où il n'y a pas de chemin

et laissez une trace"

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Bandeau Pages écrites : Jardin au Québec - Photo Ile Eniger

Description Littérature : Jardin du Douzamont Le Thor - Photo Ile Eniger

À propos : Dessin Émile Bellet

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