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7 décembre 2023 4 07 /12 /décembre /2023 13:21

C'était un temps de bruyantes agitations, de promesses fourbes, de spirales infernales, de courses effrénées à même le néant. Un temps de vernis sales, malsains, de lumières menteuses, d'intelligences mortes, d'indifférences et de paraîtres morbides. Un temps de souffles contrôlés, d'egos flattés, de luttes illusoires et fratricides, d'enterrements de petits bonheurs. C'était un temps de toutes les laideurs des humaines salissures. Elle en avait eu assez du galimatias des tu dois, il faut de ce monde malade de ses pouvoirs.  Un soir, après avoir longuement regardé le ciel étoilé, simplement, elle avait pris la décision de se choisir. Au petit matin lavé de frais, il faisait à peine jour quand elle avait tourné la clé derrière elle. Chaudement vêtue, le chat à ses côtés, elle avait pris le chemin dans une aurore neuve de murmures de plantes, de bêtes, et autres pierres précautionneuses. À son épaule, un sac solide portait son plus précieux, des mots bienveillants, des voix aimés, des images douces et fortes, une absolue respiration de confiance, d'aimance, et des choses dont peu se souciaient mais en qui elle croyait. Déterminée, elle avait quitté la dangereuse prédation, l'inutile bruit. 

 

Ile Eniger - L'ordinaire des anges (à paraître)

 

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28 novembre 2023 2 28 /11 /novembre /2023 18:12

 

Le vase brisé

 

Le vase où meurt cette verveine
D'un coup d'éventail fut fêlé ;
Le coup dut l'effleurer à peine,
Aucun bruit ne l'a révélé.

 

Mais la légère meurtrissure,
Mordant le cristal chaque jour,
D'une marche invisible et sûre
En a fait lentement le tour.

 

Son eau fraîche a fui goutte à goutte,
Le suc des fleurs s'est épuisé ;
Personne encore ne s'en doute,
N'y touchez pas, il est brisé.

 

Souvent aussi la main qu'on aime
Effleurant le coeur, le meurtrit ;
Puis le coeur se fend de lui-même,
La fleur de son amour périt ;

 

Toujours intact aux yeux du monde,
Il sent croître et pleurer tout bas
Sa blessure fine et profonde :
Il est brisé, n'y touchez pas.

 

Sully Prudhomme

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26 novembre 2023 7 26 /11 /novembre /2023 18:50

L'essentiel

est sans cesse menacé par l'insignifiant.

 

René Char

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25 novembre 2023 6 25 /11 /novembre /2023 11:10

L'heure de midi parmi les tiges qui s'élèvent.
Qui pourrait alerter le champ de l'action, émerveiller l'oiseau à son tour ?
Brève émergence à travers tant de livres sans liens, et ce cri étouffé entre les reliures annonçant la bibliothèque qui brûle.
À mesure, je prends pied dans l'insistant séjour de calcaire. Ceux qui se sont effondrés dans l'éboulis de pierres, laissez-moi les reconnaître dans le miroir qu'ils me tendent ;
comme eux, peut-être, bénéficiaire d'une promesse.

 

Dominique Sorrente - Les voix de neige - Cheyne Éditeur

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21 novembre 2023 2 21 /11 /novembre /2023 10:54

Pour les enfants des favelas braquant le désespoir,

pour les enfants d'Afrique aux yeux baignés de mouches,

pour les enfants si maigres jouant la roulette russe,

pour ceux des banlieues s'injectant l'héroïne,

pour les enfants qui naissent au milieu des décharges,

les fillettes qu'on jette dans les bras des touristes,

je réclame une épaule.

 

Pour l'enfant déjà mort dans le ventre d'une mère,

pour les otages des banques que personne n'échange,

pour les amours perdus au fond des répondeurs,

pour l'oiseau mazouté dans la mer qui se meurt,

les enterrés debout faisant la file indienne,

les hommes de terre privé de fleurs,

les femmes de mer privées de vagues,

je réclame le pain.

 

Pour les bêtes apeurées au fond des abattoirs,

les rêveurs enchaînés sur une ligne de montage,

pour les vies qui finissent dans un parc à vieillards,

les étrangers qu'on trie comme on le fait du bétail,

la bonté rabrouée par le froid des banquiers,

la beauté mise en joue par la laideur ambiante,

je réclame la paix.

 

Jean-Marc La Frenière (© - Editions Chemins de Plume - Inédit)

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11 novembre 2023 6 11 /11 /novembre /2023 19:23

Des feuilles éparses, des débris de vieilles tempêtes, une échelle, des barreaux sautés, cassés, le soleil ou pas. La beauté c’est le regard, la manière de regarder. C'est des jours boueux à laver chaque soir pour leur donner visage. De même l'amour, la bonté. Toutes ces choses-là qui portent et demandent lumière. Libres de choisir ce que l'on veut être. Le bout n’est pas forcément le haut, pas tout de suite. Le haut n’est pas forcément le bout non plus. La beauté, c’est quelqu’un ou quelque chose ou personne, c'est ce que tu choisis. Ce que tu crées. C’est là, anonyme, nu, qui attend. L’anonyme, c’est là où je m’attends. C’est le réel avant la réalité. La réalité c’est du caramel refroidi, le réel c’est fabriquer le caramel. La beauté, c'est créer la fusion, l’inventer. C'est choisir d'aimer. Après, d’autres feront des dissertations, inutiles.

 

Ile Eniger - L'ordinaire des anges - (à paraître)

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